La Balançoire - Chapitre 2
- Maï Brass

- 27 févr. 2024
- 12 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 août
C’était la saison où le soleil apparaît aux toutes petites heures. Joseph fut debout en même temps que lui. Il déjeuna en catimini puis il se précipita dans son atelier, heureux d’avoir terminé sa commande la veille. Il s’installa à son établi, sortit une grande feuille de papier et se mit à mesurer, calculer et tracer sans hésitation. Quelques heures plus tard, la petite dame descendit à son tour. C’était un jour de création et de partage. Elle avait revêtu un bleu de travail et ses cheveux tenaient dans deux nattes. Joseph l’entendit et alla la rejoindre dans la cuisine.
– Tu as bien dormi ? demanda-t-il avec sa voix la plus douce.
Elle le dévisagea froidement, sans répondre à la question. « Elle râle encore », se dit l’homme. Ils restèrent tous les deux dans le silence. Elle mangeait une tartine à la confiture et il buvait un café. Les mouches s’écrasaient lourdement contre les carreaux et ils regardaient la lune disparaître lentement dans le ciel bleu de cette matinée de canicule. Brusquement, elle demanda :
– Pourquoi tu t’es levé si tôt ?
Amusé, le père répondit :
– Pour commencer ton cadeau d’anniversaire. Je m’y prends à l’avance, cette fois…
Le visage d’Albine s’illumina pendant un quart de seconde. C’était peu, mais ce fut suffisant pour rassurer Joseph.
– Je vais en ébénisterie aujourd’hui. Chez madame Carond, dit-elle en relevant le menton et en baissant les paupières.
– Ah ? Il s’est passé quelque chose au tissage ?
– Non, j’ai juste envie de changer. Et puis Sophie m’a dit qu’on allait faire des chaises. J’ai envie d’une autre chaise.
Joseph fut touché à vif par cette pique, lui qui était si content d’avoir équipé la chambre de sa fille uniquement de ses propres mains. Il n’osait pas imaginer un meuble en bois dans cette harmonie métallique. De plus, c’était une attaque directe contre son rôle de père. Son bébé se rendait compte que ce superhéros qui l’avait élevée était en fait un homme comme les autres… Cela dit, cette jeune fille semblait devenir une femme de caractère, et ça, il pouvait en être fier. Tempête de sentiments.
– Bon, reprit-il après quelques secondes, j’y retourne. Je serai là quand tu rentres et…
– OK ! l’interrompit-elle.
Elle partit sans se retourner et fit claquer modérément la porte en quittant les lieux.
L’ébéniste habitait à seulement un kilomètre de leur domicile. Sophie, la meilleure copine d’Albine, l’attendait au coin de la rue. Elles se saluèrent puis se mirent en route en papotant, comme deux vieilles dames. Elles étaient amies depuis toujours et prévoyaient de le rester.
– C’est comme si Maman ne lui manquait pas, mais je sais qu’elle lui manque, il est triste tout le temps…
– Il n’a peut-être pas eu le temps à cause de ses travaux.
– Peut-être… Mais il a commencé mon cadeau !
Les deux petites discutèrent tout le long du trajet. Elles parlaient de leurs camarades, de ce qu’elles avaient appris dernièrement, des histoires qu’elles avaient lues ou entendues. Bref, elles parlaient comme toutes les petites filles parlent dans toutes les villes de tous les pays de tous les mondes.
Une fois arrivées, elles constatèrent qu’une vingtaine d’enfants attendaient devant la porte. C’était un atelier avec beaucoup de succès, contrairement à celui de Joseph. Ce dernier n’avait jamais été très populaire. Il était un excellent professeur, mais c’était aussi un très grand taiseux. Les curieux s’ennuient avec les taiseux. Désormais, sa maison restait vide, lors de ces moments d’apprentissage, et cela ne lui déplaisait guère.
Ce jour-là, il en profita pour s’acharner sur son nouveau projet. Son cerveau bouillonnait, il ne vit pas le temps passer jusqu’à ce que son estomac lui lance un cri de désespoir. Il était plus de quinze heures. L’homme entra dans la cuisine en souriant à pleines dents, en riant presque. Cela faisait longtemps que la passion ne l’avait pas emmené dans un tel tourbillon. À vrai dire, il ne se rappelait même pas quand était la dernière fois qu’il avait atteint cet état de flow, synonyme de feux d’artifice cérébraux. Il retrouva ses souvenirs en se préparant une omelette. Il pensa à tous les chefs-d’œuvre qui l’avaient absorbé ces vingt dernières années. Des meubles pour sa femme et sa fille, une barrière pour ses beaux-parents, un chariot pour son père, un escalier, une porte… La nostalgie l’emportait quand, soudain, il éclata de rire en réalisant que, cette fois, il mettait toute son énergie à fabriquer un objet qui ne servait à rien. Heureux, il retourna au turbin et cette vague de motivation perdura pendant toute la semaine.
Ce père se retrouvait tellement pris par l’instant présent qu’il en délaissait ses obligations. Il n’allait plus subir les longues heures de son job alimentaire. Un formulaire de justificatif d’absence apparut dans sa boîte aux lettres. Aucune des cases proposées sur cette paperasse ne lui convint alors il le déposa alors au coin d’un meuble, sur un magazine, et il n’y toucha plus. Deux jours plus tard, un contrôleur sonna à la porte :
– Bonjour monsieur, je suis envoyé par le ministère du Travail. Cela fait plusieurs jours que vous ne vous êtes pas rendu à votre job alimentaire. Pouvez-vous me donner une raison valable de ne pas remplir cette obligation ?
– Ah, oui… Eh bien, non. Enfin, je veux dire… Je travaille sur quelque chose d’important et du coup… Je n’ai pas envie d’y aller.
– Parce que vous croyez que moi j’ai envie d’être là ? Mais si tout le monde commence à n’en faire à sa tête, plus rien ne fonctionne…, dit pensivement l’agent qui était surtout potier.
– J’irai demain, c’est promis.
Joseph referma délicatement la porte au nez du brave homme qui serra les dents et tourna les talons en cochant la case « maladie ».
Après différents tests et essais, le mystérieux ouvrage se termina en temps et en heure pour l’anniversaire d’Albine. Père et fille profitaient de la soirée, veille du grand jour, en vaquant chacun à leurs occupations dans un silence apaisé. Enthousiaste, Joseph avait ordonné à sa fille de ne s’occuper de rien. Il débordait d’énergie et il fallait bien qu’elle s’épuise quelque part. Albine ne s’était pas fait prier. Elle lisait tranquillement un livre, installée dans le fameux fauteuil jaune et familial qui ne se doutait pas être en train de profiter, pour la dernière fois, de la présence de ce petit corps tout chaud dans les recoins de ses coussins. Elle ne râlait plus depuis un moment. Sa colère n’avait duré que vingt-quatre heures puis elle s’était effacée face à la surpositivité de son paternel. Néanmoins, sa tête ne s’était pas vidée. Elle observait son géniteur du coin de l’œil en se répétant qu’il était « juste un homme » et que, donc, sa maman n’avait été « qu’une femme », avec rien de véritablement exceptionnel, si ce n’est le fait de l’avoir mise au monde. Elle en avait, évidemment, parlé avec Sophie. Celle-ci mettait encore son père très haut sur un piédestal. C’était la première fois qu’elles n’étaient vraiment pas d’accord sur un sujet et cela créa un petit fossé entre elles. Leurs plans d’amitié furent subitement remis en doute, ce qui n’arrangeait pas le moral de la jeune métisse. Heureusement, son père ne cessait de traverser la maison en sifflant et en chantonnant. Sa bonne humeur était contagieuse. Bien sûr, tous ces chamboulements intérieurs n’avaient pas échappé à la vigilance de Joseph. Tout en essayant de trouver l’équilibre entre la vie de plus en plus privée d’Albine et son envie de tout savoir pour tout arranger, il espérait que ce qu’il fabriquait depuis maintenant une semaine permettrait à son amour de petite fille de se changer les idées pendant quelques instants.
Le souper fut prêt en une heure. Joseph tapota gentiment l’épaule d’Albine qui somnolait dans le divan et la dirigea vers la table en cachant ses petits yeux avec ses grandes mains. La table était dressée comme pour recevoir la présidente. Il avait sorti la nappe des grands jours, une nappe rose pâle brodée de personnages historiques dans les différentes scènes marquantes de leurs aventures. La vaisselle était aussi celle des grandes occasions. Les couverts brillaient comme des miroirs, les verres étaient en cristal et les assiettes n’étaient pas plus épaisses qu’une feuille de papier. Entourant la casserole, des pétales multicolores avaient été éparpillés et de belles feuilles vertes formaient des petits chemins qui couraient. Albine resta bouche bée pendant un court instant, ce qui permit à Joseph de se lancer :
– Excuse-moi pour la semaine passée. Je n’ai pas su comment m’y prendre et puis j’ai trop attendu. L’année prochaine, on fera quelque chose de mémorable, c’est promis. En attendant, pour ton anniversaire, comme tu l’as constaté, je m’y suis pris bien à l’avance !
En l’écoutant, Albine se disait que même si son père était un homme comme les autres, elle était bien contente que ce soit lui et pas un autre. Le repas se passa calmement, ils discutèrent et rigolèrent avec légèreté. À la fin, ils échangèrent un regard complice et se rendirent compte que les choses étaient en train de changer. Ils allaient mieux. Ce soir-là, Albine monta dormir avec la tête un peu moins encombrée. Dès qu’il fut sûr qu’elle dormait, le joyeux patriarche fonça dans son atelier pour mettre en scène son énorme présent, sa nouvelle invention. Il l’astiqua à certains endroits et mit une dernière couche de peinture à d’autres. Après avoir ouvert en grand la double porte qui donnait directement dans le petit jardin, il s’éreinta à déplacer la chose jusqu’à l’emplacement exact de son choix. La soirée était douce. C’était une de ces soirées d’été où la chaleur semble se traîner aussi longtemps que les derniers rayons du soleil. Le fond de l’horizon brillait encore d’un bleu vert très foncé et les derniers oiseaux croisaient les premières chauves-souris. Après une pause de quelques instants, passée à admirer le présent en se remémorant sa dernière cigarette, presque douze ans plus tôt, il rentra se mettre au lit et s’endormit en un clin d’œil.
Très tôt le lendemain, il se fit réveiller par un bruit de pas se voulant discret. Il ouvrit les yeux et se retrouva nez à nez avec Albine qui s’installait sous la couette. La luminosité était à peine naissante. Les aiguilles du réveil indiquaient 5h17.
– Ah, tu es réveillé ! dit-elle joyeusement en interrompant son mouvement.
– Bonjour… Bon anniversaire, répondit-il, tout pâteux.
– Je peux avoir mon cadeau ?
Le père acquiesça en secouant la tête. Il se demanda si sa fille ferait des grasses matinées pendant son adolescence ou bien si elle resterait une éternelle lève (très) tôt.
– Oui, oui, deux petites secondes. Laisse-moi juste le temps de…
Albine sortit du lit en un éclair. Elle lui jeta un tee-shirt et un caleçon puis disparut au rez-de-chaussée.
– … finir ma phrase.
Joseph ajouta un pantalon à sa tenue. Il s’étira et se regarda dans le large et inévitable miroir que sa femme avait judicieusement installé à côté de la porte, pour ne jamais quitter sa chambre sans se plaire à elle-même en premier. Ce jour-là, il se trouva plutôt beau gosse. Sa peau respirait la fraîcheur et ses petits cheveux crépus se tenaient fièrement au sommet de son crâne. Il avait trente-sept ans, sa fille allait en avoir douze et, finalement, tout allait bien. Il descendit l’escalier afin de rejoindre sa petite moitié. Assise dans la cuisine, elle l’attendait.
– J’ai fait du café, lui dit-elle dès qu’il franchit la porte.
– Merci, ma grande, dit le père.
Il entoura la tasse chaude de ses mains, c’était son rituel matinal. Après avoir croisé le regard impatient d’Albine, il dit :
– Bon, ton cadeau. Viens par ici.
– Oui ! cria la jeune fille, pleine d’enthousiasme.
Sans lâcher sa tasse, il la dirigea vers la porte donnant sur l’extérieur.
– Ferme les yeux.
Il plaça la star du jour dans la bonne orientation.
– Ouvre les yeux.
Dans la fraîcheur du matin, une structure métallique apparut. Quatre pieds reliés par une longue barre transversale à laquelle pendaient deux grosses chaînes. Les deux chaînes étaient elles-mêmes reliées par une assise, une petite plateforme qui pendouillait dans les airs, bercée par un vent tiède. Le soleil ne brillait pas encore, mais sa lumière était bien présente. Joseph put donc admirer le visage dubitatif de la jeune fille qui ne savait ni ce que c’était, ni comment s’en servir. D’ailleurs, à quoi cela servait-il ? Quand elle commença à bredouiller un « merci », il éclata de rire.
– Je ne sais pas ce que c’est, commença-t-il. L’idée m’est venue l’autre soir, face à ton horloge. Je m’imaginais devenir tout petit et m’asseoir sur la grosse boule du pendule… Du coup, j’ai fait ça. Ça sert à s’asseoir et à se balancer…
En le disant à voix haute pour la première fois, il douta. Son idée n’était peut-être pas si incroyable.
– S’asseoir et se balancer… On pourrait l’appeler un « assilancer »… Ou une « balançoire » ! s’exclama la petite.
– Euh oui, une balançoire. Va pour balançoire.
Sa fille était heureuse alors il l’était aussi. Albine courut jusqu’au nouvel objet et enfourcha maladroitement le siège. Son père s’approcha et lui expliqua le fonctionnement de la machine. Albine, une fois correctement installée sur le petit trône de fer, se laissa soulever de terre et lâcher à toute vitesse. Autour d’eux, les oiseaux se réveillaient et l’herbe verte caressait la plante de leurs pieds nus. Albine, qui découvrait pour la première fois les drôles de sensations de la fausse apesanteur, rigolait à pleines dents. Ses cheveux s’envolaient dans tous les sens. Cela dit, sans savoir comment faire pour garder de la vitesse, elle ralentit. Ses pieds traînèrent mollement sous elle. Déterminée, elle tenta de relancer la manœuvre en gigotant, mais le résultat fut peu encourageant. Elle leva tristement les yeux vers son père. Il comprit le problème avant qu’elle ne l’ait énoncé.
– Attends, on va trouver, dit-il en se grattant le menton.
Le créateur et son assistante essayèrent ensemble différentes techniques. « Tends les jambes. Non, plie-les ! », « Je perds l’équilibre ! », « Maintenant, fais-le maintenant ! ». En entendant tout ce raffut, deux ou trois voisins montrèrent leur nez. À peine réveillés ou sortis de la douche, ils assistaient au spectacle, médusés. Rapidement, Joseph et Albine arrivèrent à mettre au point une technique plutôt efficace. Il la lâchait en la poussant dans le dos pour le démarrage, puis elle s’occupait du reste en fléchissant et en tendant alternativement les jambes. Cela lui faisait prendre de la vitesse et, surtout, de la hauteur. Ce mouvement de balancier lui permit aisément de se s’imaginer chevauchant son pendule. Sur le « tic », son visage était face au sol. Suspendue pendant un court instant, elle ne sentait plus la masse de son corps ni de ses pensées. Elle aurait pu tomber et s’aplatir comme une crêpe si elle ne s’était pas accrochée de toutes ses forces à ces deux chaînes salvatrices. Cette idée la faisait frissonner pendant une fraction de seconde. Juste le temps qu’il fallait à la gravité pour reprendre le contrôle de la situation et l’envoyer valser à l’opposé exact. Sur le « tac », elle avait la tête dans les nuages et voyait à peine la cime des arbres. Les premiers rayons de soleil donnaient un ventre rose aux tourterelles. Elle aurait pu les rejoindre, s’envoler vers les cieux, faire un bisou à sa maman et redescendre tout aussi vite. Elle était projetée à toute vitesse, se jouant des lois de la physique. Elle flottait brièvement entre deux mondes avant de repartir encore vers le « tic ». Elle riait sans discontinuer, elle aurait pu faire cela pendant des heures.
Ému, Joseph l’admirait. Droit, debout à côté de son invention qui, si elle ne servait théoriquement à rien, avait le mérite de procurer de la joie. Soudain, Albine lui cria :
– Je vais sauter !
– Non ! Enfin, attends ! Je te dirai quand y aller. Ralentis un peu !
Pendant qu’il évaluait les risques de l’opération, il croisa les regards de tous leurs voisins. Ils semblaient ne pas pouvoir décoller les yeux de ce drôle de manège. Heureusement pour l’enquête policière, car, même s’ils étaient farfelus, les témoignages concordaient. Albine ralentissait donc sagement. Tout le quartier retint son souffle. Tic, un coup en arrière. Tac, un coup en avant. D’un coup, sans attendre le signal de son père, elle cria « boum ! » et sauta en écartant les bras et les jambes au maximum. Ça y était. Elle volait. Elle était aussi légère qu’un fragment de plume. Au diable les questions existentielles et sans réponse. Sa seule préoccupation était de garder physiquement le contrôle de la situation. Ses pieds approchèrent le sol à toute vitesse. Elle s’étira pour arriver le plus loin possible. Joseph et le reste du public l’observaient sans cligner des yeux. Le père s’apprêta à devoir courir en cas de mauvaise réception, mais lorsque ses gros orteils frôlèrent les plus hautes herbes, Albine disparut.
Des cris se firent entendre de tous les côtés. Les spectateurs étaient horrifiés, terrorisés par cet engin maléfique. Sidéré, Joseph resta figé pendant les premières secondes, puis il cria à son tour :
– Albine ! Albine !!
– Sorcier ! Sorcier !
– Appelez la police ! Il a fait disparaître sa fille !
– Pauvre enfant, où est donc cette pauvre enfant ?!
Une multitude de voix lui parvinrent aux oreilles. Aucune n’était celle de sa fille. Sans plus attendre, il enfourcha lui aussi la balançoire et se propulsa dans les airs. Beaucoup trop paniqué pour profiter de la magie de la chose, il plia et tendit les jambes à une vitesse folle.
– Il va disparaître à son tour !
– Sorcier ! C’est un sorcier !
– Que quelqu’un fasse quelque chose !
– Il est fou !
– Albiiiine !
Dès qu’il le put, il sauta vers l’avant. Les jambes tendues et les bras en croix. Le gazon frais s’approcha très rapidement. À l’instant où il aurait dû sentir la douceur de la pelouse, ses plantes de pieds s’écrasèrent sur des gravillons froids et humides. Il pleuvait et la douceur de la lumineuse journée qui s’annonçait avait subitement été remplacée par la grisaille et le vent froid. Il n’entendait plus les voisins ni les oiseaux. Il n’entendait que des gouttes d’eau qui s’écrasaient lourdement sur le mobilier urbain à ses côtés. Des objets qu’il n’avait jamais vus, disposés en rang. Derrière lui se trouvait une autre balançoire que la sienne, ce qui acheva de le déconcerter.
– Albine ! cria-t-il à pleins poumons.
Il s’était retrouvé dans une sorte de petit parc fait de pierre et de métal. De gigantesques immeubles l’entouraient et les rues étaient bordées de buildings dont les sommets avaient du mal à se montrer tant la couche nuageuse était épaisse. Pas un chat ne passait sous son nez. Tout était complètement calme et désert.
– Albine, c’est moi, c’est papa !
Une main lui couvrit la bouche et la voix d’un jeune homme lui parvint :
– Êtes-vous fou, Baron ? Pardon, mais vous savez que c’est interdit !
– Baron ? Je ne suis pas un baron ! Avez-vous vu ma fille ? Elle fait à peu près cette taille et…
– Oh, vous êtes vraiment fou… l’interrompit le jeune homme. Pardon Baron, mais taisez-vous et suivez-moi, ça vaut mieux je crois !
L’homme lui attrapa violemment le bras et le traîna à sa suite en marchant à vive allure.


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